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Le champ des possibles​

« 2023 ouvrira le champ des possibles »

Comme chaque année un credo, un leitmotiv, qui se construit tranquillement à partir de novembre, ne se met en mots qu’aux premiers jours de janvier ou parfois des semaines avant le 1er de l’an. Comme un puzzle dont les pièces intègrent la boite au fur et à mesure des images, des impressions, des associations qui me traversent, et qui d’un coup s’assemblent sans même me prévenir pour m’imposer une phrase, une intention : le credo de l’année.

 » 2023 ouvrira le champ des possibles. »

Il y en a eu des possibles cette année plus surprenants les uns que les autres, certains destructeurs, certains salvateurs, certains légers comme le vent qui porte et d’autres lourds comme les larmes qui coulent.

Je parlerai ici d’un possible salvateur : la psychanalyse.

Plutôt humble et accueillante face aux évènements amenés par la vie, je m’étais dit en faisant le choix de quitter un poste et plus encore, une profession dans laquelle je m’épanouissais, qu’il me faudrait un petit temps de convalescence (que j’avais estimé à 3-4 mois) pour lancer ma nouvelle activité dans la nouvelle orientation professionnelle que j’avais choisie. Quelle bonne farce je me suis faite ! Cela était sans compter sur ma capacité à inscrire dans mon corps les tourments que je laissais derrière moi en actant mon départ, en faisant certains choix. Tant et si bien que la convalescence évaluée à 3 mois s’est transformée en une somatisation progressive avec le choc d’une annonce alarmante concernant mon état de santé 5 mois après avoir quitté mon emploi. Alarmante, oui comme une sirène hurlante, car avec les années mon corps et moi avons échangé à tellement de reprises qu’il s’est dit d’y aller suffisamment fort d’un coup, histoire que je ne passe pas à côté de l’essentiel. Merci à toi, mon corps ! Quand le médecin, de nature plutôt confiante, me suggère vivement de passer une IRM, me décrit ce qui s’inscrit en moi, la loi des associations fait son œuvre : c’est donc de là que je n’arrive pas à m’extirper, de ce marasme que j’ai quitté, pour mieux qu’il s’installe en moi. Ah ça, non !

Le corps parlant

Le corps parle, mon corps parle et je l’entends, je l’écoute, mais que faire. Entrer en action comme je le fais toujours, j’ai bien quelque chose en tête mais à le faire une autre chose me dit que ce n’est pas forcément cela qui doit être fait. Je vais au rendez-vous prévu chez le psychanalyste avec tout ça dans mon sac. J’ai tous les éléments, et je cogne là où habituellement je laisse venir les solutions, je me cogne à moi. Et là, le psychanalyste, avec son savoir-faire, me fait vivre une abréaction. A ceux qui ne connaissent pas, c’est une sensation à la fois physique et psychique qui s’apparente à une forme de délivrance. A ceux qui connaissent : vous voyez de quoi je parle. Bon …, sur le moment ce n’était pas léger, c’était plutôt le poids de l’évidence : la tête lourde, un substrat à la fois dense et impalpable qui fait son œuvre dans mon cerveau. Je m’arrête là, je suis stoppée. Ecouter la musique, rouler en voiture, mais pour aller où, … décrocher le téléphone, il n’y a que cela à faire. « Bonjour, j’appelle sur les conseils de mon psychanalyste ; il me suggère de m’inscrire à la formation proposée par IPHI ». « Venez ce soir, c’est justement le groupe qui a commencé en février ». Deuxième appel : « Tu peux t’occuper des enfants ce soir, je dois assister à un cours ».

Tout s’organise pour que cela se fasse. J’y vais, je dis bonjour, je m’assois, et là je me rends compte que ça faisait bien longtemps que je ne m’étais pas sentie à ma place : je suis juste là où je dois être. Au sortir du cours, c’est comme un poids en moins, un dénouement en bas du ventre. Un truc incroyable : je suis en mesure de sentir le marasme se désenchevêtrer.

Une ode à la liberté

Le lendemain, je monte au grenier, je trie, je garde, je jette, je réserve pour l’un ou pour l’autre, et j’appelle. « Je souhaite m’inscrire dans le cursus que vous proposez ».

Quelques semaines après, je vais au centre d’imagerie pour l’IRM. Je suis légère, avec toutefois un doute : « Ma pauvre fille, tu n’as plus mal, tu sens qu’il n’y a plus rien, mais tu peux tomber de haut à l’annonce des résultats ». Et les résultats sont là : toutes les parties sont saines (saines et sauves !). Envoi au médecin, appel au médecin : « Totalement improbable, incroyable aux vues des résultats de l’examen, il y a un mois, clichés à l’appui. » Je lui raconte ce que cet examen a provoqué chez moi : l’association d’idées, la séance chez le psychanalyste, l’engagement dans la formation, et la disparition rapide des premiers symptômes, puis des autres. « Je suis en fin de carrière vous le savez, j’en ai vu des choses, et je crois profondément à ce que vous me racontez, au lien entre le corps, l’âme et l’Esprit. Continuez. »

La singularité de chaque chemin est une ode à la liberté. C’est là le récit de l’entrée en formation d’une élève analyste. Quel est le vôtre ?

Bénédicte LEGENDRE, Elève analyste